Les cartes en couleurs du Ministère des Affaires Etrangères

Faut-il faire confiance aux cartes du site "Conseils aux voyageurs" ?

Réponse simplifiée : Oui.

Réponse développée :

Devant l'engouement quasi international lié à la qualité de ce blog, je me vois contraint d'ajouter de nouveaux sujets pour délecter un auditoire assidu et éclairé, dont la présence me remplit d'une joie timide mais néanmoins solide.
Merci de ne pas cliquer à tout va sur mes pages, mon compteur de visites ne possède que 5 chiffres et j'en suis déjà à 165 visites au 1er avril (soit, si on considère la population mondiale à 7,5 milliards d'individus, environ 0.0000022 % de cette sus-dite population qui serait venue visiter mes lignes). Sauf que certains sont certainement venus plusieurs fois, subjugués par tant de finesse, tant de réflexion et d'ouverture d'esprit...
Et puis il y a ceux qui n'osent pas. Timidité maladive ? Blocage psychologique ? C'est l'heure de sortir les poubelles ? Le chat a vomi sur la moquette au moment d'attaquer la lecture de ce blog parmi les plus envoûtants au monde ?
Bref, vous êtes là et je peux vous dire que "Cliquer, c'est pas du cynisme"... Aux fervents adeptes des contrepèteries du Moyen-Empire, j'avoue que celle-ci me comble de bonheur.

Je me disais que j'allais vous parler aujourd'hui des cartes du site : https://www.diplomatie.gouv.fr/
Ce site est la référence inamovible pour qui souhaite partir à l'étranger, mine (!) de conseils en tous genres et une propension incontestable à coller à l'actualité géopolitique. Bien sûr, vous êtes autorisés à prendre un minimum de recul par rapport aux informations divulguées ici, et nous allons voir comment il est possible de suivre certaines d'entre elles sans se pourrir son voyage, euphémisme...
Ah oui parce que si vous suivez à la lettre les recommandations du ministère, il est sage de rester dans votre maison du 33 avenue des martyrs, à Romorantin, au fond de l'impasse. Et enfermez-vous à double tour, on ne sait jamais, des fois que le chat de la voisine viendrait vomir sur VOTRE moquette du salon... On en a même vu quelques-uns se suicider après avoir parcouru ce site, de peur de mourir dans d'atroces souffrances à l'étranger.
En effet, quand on ouvre ces pages, on se demande pourquoi certains pays vivent encore au XVIIème siècle et on préfère réserver un week-end bien lourd dans un Center Park hexagonal.
Lorsque vous aurez franchi presque toutes les étapes qui ne vous rebutent pas : crèmes contre des moustiques de 600 grammes, allergies à l'eau potable, risques en serrant la main du guichetier de musée qui a cueilli des figues de Barbarie la nuit précédente, accidents liés à la morsure d'un Varan de Komodo (c'est rare mais il faut bien qu'ils mangent eux aussi), accidents de Montgolfière - véridique ! -, risques de servir de mule (pas vous, votre véhicule...) pour transporter de la drogue ou des armes sur des zones de conflit, risques d'éruption volcanique le jour où vous avez prévu de bivouaquer sur le Krakatoa en nuisette, etc... quand vous aurez franchi toutes ces étapes, donc, gonflé-e à bloc et prêt à en découdre avec l'adversité, vous serez bloqué-e à la frontière comme un pangolin qui cherche à mettre un coup de boule à une girafe parce que, par exemple, le pays que vous envisagez de visiter refuse ... les véhicules Diesel ! Pas besoin d'aller au diable, c'est le cas du Liban par exemple...
J'en rajoute un poil ici et je ne remets pas en cause le bien fondé et le sérieux avec lesquels ces professionnels mettent en garde les dilettantes que nous sommes. Je suis un peu critique et même grivois alors que je suis le premier à dévorer les informations relatées dans les pages de ce site.
D'ailleurs, tout ce qui concerne l'aspect administratif (durée des visas, etc...) est primordial et je n'envisage pas une seconde de m'en affranchir. De même, la localisation des foyers de ténia, de fièvre aphteuse et autres germes de vérole peut être d'un fier secours au moment de goûter le ragoût gentiment proposé par le chef du village un soir de nouba...
Maintenant, ce qui nous intéresse ici, ce sont les cartes. Celles qui donnent une idée des zones à éviter en fonction de leur dangerosité pour des touristes ou des déplacements professionnels. Et là, je remplace volontiers la fanfaronnade typiquement franchouillarde par une pointe de circonspection. En clair, je vous conseille de vous conformer sagement aux recommandations stipulées sur ce site. Cela n'empêche pas de parcourir en détail les textes pour chaque pays, afin d'établir un diagnostic précis sur les risques encourus en fonction de votre propre parcours. Nous le verrons plus loin en prenant l'exemple du Kosovo.

Donc imaginons qu'après la lecture de mon article, vous décidiez d'un commun accord avec vous-même de consulter les cartes dédiées aux voyageurs...
Sans doute suis-je trop modeste lorsque je parle de "lecture de mon article", vous êtes en train de le dévorer, mais faites gaffe, il y a justement un varan de Komodo dans votre rétroviseur qui se rapproche à 45 km/h. Il a faim. Non, vous ne le voyez pas, il est dans l'angle mort... Vous aussi, bientôt, sans l'angle d'ailleurs, car sa morsure, en plus d'être profondément douloureuse, va vous injecter une dose de bactéries tellement puissante qu'elle ferait battre en retraite une armée de pesticides affamés.

Bref, vous tentez votre chance sur la première carte qui s'ouvre devant vous et vous êtes, une fois de plus, perplexe, presque suspicieux - encore un mot que j'aime bien, même si je préfère "belliqueux" - à mon endroit parce que vous avez l'impression que dans cette histoire je vous ai pris pour un gros jambon...
Elle est où cette fameuse carte ?
Ben en-dessous, pas la peine de s'énerver :


Et c'est vrai que Josiane (la petite voisine que vous aviez sévèrement impressionnée en lui assénant la photo de vous au cap nord de la Slovaquie) va rester complètement interdite devant cette carte mondiale, persuadée que vous cherchez encore une fois à l'humilier. Sauf que vous non plus, vous n'êtes pas à l'aise du tout en voyant cette carte.
Vous êtes à deux doigts de parier que j'ai interverti malencontreusement avec la carte indiquant les maxima de températures par pays en 2017. Je concède que c'est trompeur. C'est quoi cette grosse bande rouge avec reflets oranges autour de l'équateur ? Il n'y a que là-bas que les guerres sont de qualité ? On a pourtant un passé suffisamment glorieux dans ce domaine pour ne pas se faire enrhumer de la sorte, nous les occidentaux. Bon c'est vrai qu'on y participe indirectement à ces guerres contemporaines, en assurant l'intendance et l'import-export, mais quand même ! On pourrait presque passer pour des lopettes pacifistes.
La bande sahélienne - accouplée avec le Proche Orient - explose donc tous les pronostics avec des points forts incontestés et rivalisant de stratagèmes pour pourrir la vie des gens. Félicitations !



Prenons des exemples...
La Libye et la Syrie ont d'ores et déjà placé la barre (de fer) très haut et sont en rouge intégral. Chapeau les artistes. Pas un seul coin de ces pays n'est à l'abri de la violence et de la terreur. Au regard de la superficie totale, c'était pas évident, mais ils ont fait le job, du grand art.
Je n'ai même pas évoqué le Yemen, dont la face rouge est assortie d'une bande sécurité orange chez ses voisins.On dit même que les oiseaux migrateurs lisent ces cartes et dévient leur trajectoire pour ne pas gêner le travail des pilotes de Mig...
A titre de comparaison, la Corée du Nord n'est qu'en orange !
On trouve ensuite des nations beaucoup moins en confiance, peut-être déstabilisées par des mouvements démocratiques internes insufflant l'envie de créer quelques zones oranges où l'on ne meurt pas le premier soir, seulement avant la fin de la première semaine de séjour. C'est presque plus malsain d'ailleurs, car on y prendrait goût, on ne se méfierait plus et paf ! Une grenade dans les naseaux...
Dans la liste de ces pays bicolores, l'Algérie est un bon exemple, avec une large zone orange au nord de l'inexpugnable zone rouge au sud. On note toutefois des carrés jaunes, représentant les villes où une "simple" vigilance renforcée suffit... Mais il faut le gilet pare-balle dès que l'on quitte le périmètre de la cité... L'Irak est un pays plus joueur... Je passe sous silence la zone rouge, de belle taille, ainsi que la zone orange du sud, nettement moins dangereuse (!). Mais regardez au nord : il existe bel et bien une zone orange enclavée dans la zone rouge. Ben... avion obligatoire alors...
Impossible d'entrer par la Turquie, l'Iran, contraints que nous sommes de faire confiance aux compagnies aériennes locales. Ca se tente... une seule fois en général...
Restent malgré tout dans cette zone quelques pays récalcitrants, assez mal intégrés et parsemés de vert... Vilains petits canards ? Asociaux notoires ? Quelles sont ces nations qui ne sont pas envahies par la guerre ? Bon quelques Emirats où l'argent passe encore – de peu – avant les massacres mais en persévérant, il devraient rosir un de ces jours. Et le Maroc ! Le Maroc est en vert ! Voilà donc la dernière destination où l'on peut se rendre en vacances sans risquer de se faire égorger en visitant le souk de Fes. Bien sûr, la frontière algérienne au sud est en jaune, c'est bien le moins que l'on pouvait envisager, tout comme le Sahara Occidental, arborant sur son flanc est un liseré rouge qui lui va à ravir le long de la Mauritanie. Mais le Maroc est en vert !
Si l'on remonte en Europe Continentale, on a l'impression de vivre quasiment chez les Bisounours, c'est déprimant... Aucune guerre déclarée officiellement. On se tripote ou quoi ? Un petit conflit armé, ça détend pourtant. Je n'exige pas non plus une retraite de Russie à l'ancienne durant laquelle, comme l'a finement fait remarquer Fernand Naudin : " C'est ceux qui étaient à la traîne qui ont été repassés". Non, je ne souhaite à personne de rentrer de Moscou à pied en plein hiver avec pour seule nourriture son ceinturon en cuir... Quelle idée de mâchouiller une ceinture sans l'avoir désinfectée. Enfin les règles d'hygiène, ça s'observe que diable !


Mais bon, où sont les boss ? Moi je veux bien faire un article sur les zones délicates mais franchement : rien entre les deux Irlande ! Ca commence plutôt mal ! En éventrant des bouteilles de scotch on doit pourtant réussir de belles bagarres de catch en plein air, à la nuit tombante dans des ruelles mal éclairées ? Irlande en vert -bouteille- bien sûr...
Et Chypre est aussi en vert ? Ben là faut m'expliquer... Pays de l'Union Européenne, qui utilise l'Euro (oui oui), coupé en deux depuis 1974 et dont la capitale est traversée par un mur de 4 mètres de haut... En vert ?
Mais combien de kilomètres va-t-on devoir parcourir pour trouver enfin de la couleur ?

Ah j'y suis... la Yougoslavie... Disons l'ex-Yougoslavie. Oh ce n'est pas de l'écarlate, du cramoisi, du vermillon... Mais des traces jaunes curieuses jalonnent la région...

Merci à nos amis ex-yougoslaves d'avoir laissé traîner quelques munitions au bord de la route. Ces mines permettent enfin de colorer un peu notre continent de couleurs plus chaleureuses ! Avant de vous rendre dans ces coins, vérifiez quand même sur les cartes où se situent les zones piégées, ou pas encore nettoyées par les démineurs... Ce serait regrettable d'aller faire un trou dans vos espadrilles fleuries sous prétexte que vous souhaitez absolument cueillir un cèpe à dix mètres pour le dîner (vous n'avez déjà même pas vérifié que votre camping-gaz est toujours opérationnel...).
Donc on regarde la carte, on mémorise les bandes jaunes et ensuite on décide du parcours pour la randonnée du lendemain... Cela évite à l'hélicoptère de la Sécurité Civile de venir vous chercher (en plusieurs morceaux) au centre de la Bosnie... Si vous croisez, au bord de la route, des panneaux rouges affublés d'une tête de mort, restez calmes et ne vous enflammez pas : c'est sûrement du sérieux, ne confondez pas avec une information indiquant le passage hypothétique d'un camion de carburant.

Nord de Srebrenica, Bosnie

De même, les glissements de terrain modifient chaque année la position des mines, en particulier au bord des rivières. Merci de ne vous baigner que si vous savez nager et si par hasard vous trouvez dans le lit majestueux d'un ruisseau un disque métallique qui ressemble à une assiette de ball-trap, évitez de la choper entre vos dents pour la ramener comme un cador à votre épouse, elle pourrait vous rejeter à la mer sans ménagement...


Je termine ce paragraphe par le Kosovo. Une seule zone est en vigilance "jaune" : la partie frontalière du Monténégro au nord. On se dit qu'il y a là aussi des mines et des trafics de bonne facture. Oui mais on n'aurait pas imaginé qu'il s'agisse d'hommes armés qui braconnent ... des forêts entières... C'est véridique et vérifiable sur le site...
Il nous reste à évoquer les zones européennes encore plus délicates à visiter.
En orange, pour commencer, on trouve la Crimée. La criminalité n'est pas plus élevée qu'ailleurs en Europe, d'ailleurs moins que dans bien des grandes villes occidentales. Mais c'est un tel imbroglio pour avoir des papiers en règle à l'entre, à la sortie, pendant le séjour, en fonction de votre poste frontière d'entrée, etc... qu'il vaut mieux rester chez vous... Un peu comme si on cherchait à vous décourager... 


De la même façon, l'entrée – et la sortie - en Transnistrie, cette bande de terre incroyable le long du Dniestr, relève du petit exploit. En pénétrant dans ce territoire, situé, je le rappelle, en République de Moldavie, on remarque bien vite la largeur des képis au poste de police, et surtout leurs couleurs : celles de l'Armée Rouge... On n'y fait pas le Mariolle dès le premier jour... (Oui Mariolle ça s'écrit comme ça, un adjudant-chef m'avait expliqué ça pendant mon service, il y a un lien intéressant en cliquant ici...). Les russes administrent ce terrain où les usines fabriquent un peu de tout.
Non, pas tout. On n'a pas trouvé de yaourts bio, ni de médicaments dernier cri pour les nourrissons, et moins encore de tissus aux couleurs chatoyantes pour orner les devantures des mairies lors de grandes fêtes populaires pleines d'allégresse et de convivialité...
Par contre, si vous cherchez des produits chimiques pour désherber, y compris le métal, vous êtes à la bonne adresse...

Statue de Lénine, Rabnitza, Transnistrie

Prudence donc, contentez-vous d'un bon repas au restaurant sous la statue de Lénine et rentrez sagement le soir, par le même chemin. N'oubliez pas de dépenser vos derniers roubles en prenant une barre chocolatée à la dernière station. Elle vous sera d'un grand secours lorsque deux berlines noires vous poursuivront pour vous emprunter à titre définitif votre mini-frigo, votre GPS et vos lunettes si elles sont à la bonne taille...
Pour conclure ici et maintenant (mon épouse me dit que c'est trop long, j'adore !), je termine donc cet article splendide en vous disant :

"Partez après avoir lu les Conseils aux Voyageurs, les cartes en particulier, elles sont explicites et très précises. Prenez tout de même un peu de recul et vérifiez en quoi ces informations vous seront réellement utiles sur place. Pas besoin de stresser comme une victime de vertige en sandales au sommet de la Tour Montparnasse le jour de la révision des garde-fous si vous ne vous rendez pas dans les zones délicates..."

Et pensez bien que :
  • si vous suivez les recommandations de trop près, vous ne partirez plus car vous aurez une trouille bleue (seule couleur primaire absente du site) de vous faire enfourcher par un auroch enragé sur un col en Slovénie. C'est vrai que c'est rare mais pas mathématiquement impossible...
  • si vous ne les suivez pas, vous risquez de vous retrouver dans un container mal éclairé en train d'expliquer votre bonne foi à deux douaniers un poil revêches qui voudront vous racketter parce que vous n'avez pas signé de décharge au garde forestier avant de vous engager en 4x4 sur une pelouse classée au patrimoine mondial de l'Unesco. Vous aurez très mal au ventre et vous serez complètement désorienté car vous ne savez pas dire "appendicite aiguë" en danois...
  • Au boulot les baroudeurs...

Je me rends compte d'une belle boulette de ma part à la relecture de ces lignes. Ça me gêne un peu de l'évoquer de façon aussi crue et tonitruante mais, comment dire... Disons que si vous souffrez de certaines pathologies chroniques irréversibles, faut faire gaffe...
Pour aller droit au but, je dis simplement que si vous êtes Daltonien - le mot est lâché - , restez vigilant ou faites vous guider, parce que si vous confondez niaisement une zone rouge avec une verte, vous risquez d'être obligé de courir très très vite. Et il est plus que plausible que vous ne soyez pas le seul à courir.
Pour imager un peu mes propos, si vous avez cru que le port de Kaliningrad est "vert" en pleine nuit et que vous pouvez y flâner avec vos bracelets en or, vous risquez de sentir sur votre nuque le souffle chaud des malfrats qui, eux aussi, courent plus vite la nuit. Mais arrivé au bout du quai de déchargement des porte-containers japonais, il faudra faire un choix...
Alors de grâce, révisez vos couleurs...






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